L'édito septembre 2024

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Eclairer, partager, décloisonner, surprendre les nouvelles tendances, décrypter les signaux faibles…, autrement dit « Réveiller nos futurs », la proposition de la newsletter d’Auxilia. Prospective et réaliste, nous l’avons imaginée comme une source d’inspiration pour les territoires et les structures que nous accompagnons, quels qu’ils soient.

Mobilité du quotidien : les Français.es à bout de souffle ?

Votre auteur et interlocuteurMarc FONTANES

Marc FONTANES

Directeur général adjoint et de l'expertise Mobilités

Ce numéro de Septembre de « Réveiller nos futurs », la newsletter d’Auxilia partage les résultats du Baromètre des Mobilités du Quotidien Wimoov.

Après 2019 et 2021, la troisième édition (2023) du Baromètre des Mobilités du Quotidien, réalisé par Auxilia et TMO pour le compte de l’association Wimoov, vient d’être publiée. Les résultats, souvent préoccupants, présentent également des motifs de se réjouir, tout en interpellant la capacité de nos politiques publiques à rencontrer leurs cibles.

Les enseignements de l’édition 2023 du Baromètre des Mobilités du Quotidien Wimoov (BMQ), vaste enquête réalisée auprès de 12 387 Françaises et Français, sont quelque peu inquiétants. La mesure de la précarité mobilité, indice composite construit spécifiquement pour le BMQ , indique en effet que la situation s’aggrave. 15 millions de nos concitoyenn.e.s sont ainsi dans une situation « à risque » en matière de mobilité, contre 13,3 millions en 2021, du fait de différents facteurs qui se cumulent : augmentation des prix du carburant dans un contexte global d’inflation, vieillissement du parc automobile, augmentation des renoncements à la mobilité… Le tout dans un contexte où de nombreux déplacements contraints – travailler, se soigner – restent directement dépendants de la voiture.

Optimiser l’usage de la voiture pour en réduire le coût : les Français.es face à un plafond de verre

Comme en 2019 et 2021, nous avons confronté les répondant.es, à quatre scénarios d’augmentation des prix du carburant : +15 %, +30 %, +50 %, +100 %. Compte tenu de l’augmentation réelle des prix ces deux dernières années, nous nous attendions à une forte projection de diminution de l’usage de la voiture. En pratique, cette tendance est plutôt faible, tandis que l’abandon de l’usage deviendrait presque exceptionnel. Il est de fait de plus en plus difficile de renoncer à cette dépense, une illustration marquante de la dépendance à la voiture, en particulier pour les actifs et les habitant.es des communes peu denses, dont les stratégies d’optimisation atteignent leurs limites.

En 2023, nous avons souhaité mesurer les phénomènes de non-recours aux aides à la mobilité à l’échelle nationale. Les résultats sont édifiants : les personnes qui ont le plus besoin de ces aides sont celles qui en bénéficient le moins, et plus globalement on ne peut que regretter une large méconnaissance de ces dispositifs : 2 Française.s sur 3 ne connaissent pas les aides à la conversion, 8 % seulement en ont bénéficié ; 4 actif.ve.s sur 5 ne connaissent pas le Forfait mobilité durable, 6 % seulement en bénéficient. Ces phénomènes de non-recours, que nous avions identifiés en 2023 auprès d’habitant.es de Montreuil et Villeurbanne à la demande du Ministère de la Transition Ecologique, dissimulent de nombreux facteurs. Ces derniers peuvent être rassemblés en deux grandes catégories : les problématiques économiques – les Français.es considèrent que le nouveau véhicule restera toujours trop cher ou qu’ils ne pourront pas avancer les frais le temps de changer de véhicule – et les problématiques de perception – d’une certaine façon, on s’interdit de demander une aide, parce que l’on pense qu’on ne pourra pas en bénéficier, parce qu’on n’y a pas pensé, parce que les critères sont trop complexes ou encore parce qu’on ne sait pas comment faire.

La voiture, valeur refuge de l’adaptation au changement climatique ?

Autre résultat inédit de cette nouvelle édition 2023 : le comportement de mobilité des Français.es face aux aléas concrets liés au changement climatique. Lors des trois dernières années, en cas de canicule, sécheresse, incendie de forêt, inondation, grand froid, tempête… 46 % des Français.es ont modifié leurs usages de mobilité, soit pour renoncer à se déplacer, soit pour se déplacer différemment. Dans ce dernier cas, la « valeur refuge » est, pour près d’une personne sur deux, la voiture. Si elles montrent que le rapport au changement climatique peut s’avérer finalement très concret à court terme, ces observations laissent songeur quant à la capacité de notre système de mobilité à s’adapter.

L’intermodalité, grand défi des prochaines années

L’un des grands enseignements de cette nouvelle édition est que près d’1 Français.e sur 4 pratique au moins de temps en temps l’intermodalité, tandis que 9 % de la population en a une pratique systématique. Ces données sont essentielles dans la mesure où l’intermodalité est probablement la solution alternative la plus concurrentielle à la voiture notamment dans les territoires moins denses et pour les trajets longs.

Un véritable défi pour les Autorités Organisatrices de la Mobilité (AOM), à commencer par les régions.

Elles pourront cependant s’appuyer sur un constat très encourageant : les usagers intermodaux sont des « fidèles » de cette pratique. Une fois le « coût d’entrée » de l’intermodalité passé – connaître et comprendre les différents modes, disposer des moyens matériels correspondants, etc. – les conditions du trajet sont maîtrisées et le déplacement devient très efficace. On notera au passage que si la marche et les transports en commun sont logiquement les modes respectivement utilisés le plus souvent en premier et en second, la voiture est le troisième mode clé de l’intermodalité, de quoi alimenter la réflexion et l’action en matière de développement de la voiture servicielle.

Si les transports en commun sont donc au cœur de l’intermodalité, ils sont également très appréciés de leurs utilisateurs, qu’il s’agisse de ponctualité, de sécurité ou encore de confort. D’autres motifs de se réjouir tels qu’une conscience plus affutée des Française.es quant à l’ impact de leur mobilité individuelle sur l’environnement ou encore une diminution des renoncements à se déplacer pour accéder à un emploi, sont également à relever.

La LOM et les politiques publiques au défi de rencontrer leurs cibles

Wimoov et la Fondation pour la Nature et l’Homme ont conçu le BMQ pour mieux comprendre la mobilité des Français.es au croisement des enjeux sociaux et environnementaux, mais aussi pour mesurer les impacts de la Loi d’Orientation des Mobilités (LOM) de 2019. L’édition 2023 met de ce point de vue en évidence une réelle distance entre les politiques publiques issues de la LOM, ou concomitantes à cette dernière, et la réalité quotidienne des Français.es. Si leurs visées sont louables, la capacité d’appropriation par la population reste à ce stade limitée. C’est le cas par exemple des aides à la mobilité, de l’accessibilité à une offre de transport ou de mobilité dans les territoires peu denses ou encore des programmes ciblant le développement du covoiturage.

Un ensemble de questions y est nécessairement associé : comment mieux interpréter la « boîte à outils » que constitue la LOM, comment financer les politiques de mobilité (par exemple, les régions n’ont pas la possibilité de lever le versement mobilité pour les territoires dont elles sont AOM de substitution), comment renforcer la coopération via les Contrats Opérationnels de Mobilité et les Plans d’Action en matière de Mobilité Solidaire, ou encore comment mieux articuler les préceptes de la LOM avec d’autres politiques ou réglementation telles que les Zones à Faibles Emissions ou la mise en œuvre des Services Express Régionaux Métropolitains.

Le Baromètre des Mobilités des Quotidiens est publié par Wimoov, avec l’appui de ses partenaires 2023 : ADEME, MACIF, Ministère de la Transition Ecologique, SNCF et département de la Guadeloupe. Il est réalisé par Auxilia et TMO.
L’ensemble des résultats de la troisième édition sont accessible ici.

Newsletter conçue par Margot Rat-Patron, cheffe de projets Energie & climat et toute l’équipe. Bravo Margot 😉

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