Faisons entrer la biodiversité dans les politiques territoriales !

21 avril 2020 20:44
Faisons entrer la biodiversité dans les politiques territoriales !
Chapô

Dans la continuité d’un premier article dressant un panorama des réponses institutionnelles à la préservation de la biodiversité, il s’agit ici d’interroger les raisons et les avantages d’une réelle intégration de cet enjeu dans les politiques territoriales.

La biodiversité, parent pauvre des politiques locales de transition écologique

 

La biodiversité connaît une érosion sans précédent, menacée par des causes multiples - artificialisation des sols, fragmentation des habitats, invasions biologiques, surexploitation des espèces, pollutions… (rapport de l’IPBES, mai 2019) - et amplifiée par les effets du dérèglement climatique. Bien qu’elle fasse l’objet d’une attention législative depuis plusieurs décennies, la question de la préservation de la diversité biologique figure toutefois parmi les parents pauvres des politiques locales de transition écologique. En effet, les territoires et dans une certaine mesure les entreprises, considérés aujourd’hui comme les « acteurs locaux » de tous les changements, se trouvent enserrés dans un mille-feuilles d’objectifs tant environnementaux (plans climat, de déplacement, de prévention des déchets, de gestion des milieux aquatiques…) qu’urbanistiques (plan local d’urbanisme, plan local d’habitat, schéma de cohérence territoriale, schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires …), économiques ou encore sociaux. Dans ce contexte, la question de l’érosion de la biodiversité peine clairement à se faire entendre, et demeure remise à « plus tard », la priorité étant par exemple donnée à la gestion des enjeux énergétiques, perçus bien souvent comme plus immédiats, tangibles, maîtrisables, et économiquement plus rentables.
 

Outils mobilisables par les collectivités sur les enjeux biodiversité


L’intégration de la biodiversité aux politiques locales existantes (tourisme, économie, énergie, urbanisme, alimentation...) est le plus souvent considérée comme un effort additionnel. Elle relève donc principalement soit de politiques territoriales volontaristes, soit de co-bénéfices induits, volontaires ou non, d’autres politiques sectorielles, comme des suppléments d’âme de politiques déjà engagées (politiques foncières, politiques de l’eau…).

Parce que le problème est complexe, récent et appelle à la déconstruction de notre rapport artificiellement dissocié de la nature, l’intégration de la biodiversité dans l’action territoriale, à l’instar de l’adaptation au changement climatique, modifie a priori nécessairement les façons de faire et de penser l’aménagement du territoire, son développement, et son avenir. Si la transversalité des politiques est admise aujourd’hui comme condition de mise en œuvre des politiques publiques, en particulier en matière d’aménagement et de développement durable des territoires, elle peine encore à se mettre en place et à produire les résultats attendus dans le champ environnemental.

 

Tous les services que les écosystèmes nous rendent

 

Son harmonie et son esthétisme naturel, son origine qui remonte à la nuit des temps, pourraient être des raisons suffisantes pour assurer la préservation de la biodiversité. Les paysages naturels tout autant que la diversité des espèces sont parties intégrante de la culture patrimoniale d’un territoire (ce sont notamment les raisons qui ont motivé les initiatives de patrimonialisation de la nature, dès les années 1950, ou même dès Yellowstone). Et l’absence ou l’éloignement de ces repères générationnels, historiques et culturels fragilise l’équilibre de nos sociétés. Cependant, cette approche « patrimoniale », « sociale », « occidentale » ne doit pas occulter une réalité intangible : la survie de l’espèce humaine dépend de la préservation de nos écosystèmes et des services vitaux qu’ils nous rendent - de l’air que nous respirons, de l’eau que nous buvons, de la terre qui nous nourrit.

 

Cette approche fonctionnaliste de la nature s’illustre notamment à travers la notion de « services écosystémiques », c’est-à-dire les composantes des écosystèmes dont la société tire des bénéfices explicites. Ces services peuvent être classés en quatre catégories (Millennium Ecosystem Assessment) :

  • Les services de soutien / support : les services à la base de toute vie biologique
  • Les services de régulation : les avantages tirés de la régulation de processus écosystémiques
  • Les services d’approvisionnement : les produits fournis par les écosystèmes
  • Les services culturels : les avantages immatériels
Services écosystémiques

 

 

L’intérêt d’intégrer la biodiversité aux politiques territoriales

 

L’érosion de la biodiversité n’a jamais été aussi fulgurante, et elle génère déjà des coûts socio-économiques conséquents, tout en menaçant la qualité de vie de l’Homme et les fondements de son existence. Fin ou moyen de la transition écologique, la biodiversité apparaît comme une de ses conditions nécessaires et ne peut en être dissociée. Pour toutes ces raisons, la prise en compte de la diversité biologique et sa protection, voire restauration, dans les politiques territoriales est indispensable.

 

C’est donc à travers une approche intégrée et englobante de la gestion des territoires, rapprochant TOUS les acteurs dont l’action a une influence directe ou indirecte sur la diversité biologique, avec ceux qui produisent et élaborent les politiques publiques locales, que ce défi pourra être relevé. Nous sommes convaincus chez Auxilia que les objectifs de la transition écologique ne pourront être atteints que si les enjeux du vivant participent à la construction des politiques territoriales. Réintégrons la biodiversité à sa juste place, dans ses fonctions originelles et vitales, dans ses interactions positives avec l’humain, dans sa capacité à créer du lien. Laissons-lui nous fixer un cap, il sera celui de la résilience, il est celui des territoires autonomes et sobres. Laissons entrer la biodiversité dans les politiques territoriales !  

 

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